Opéra-Comique. Don César de Bazan, par M. d’Ennery, musique de M. Jules Massenet
par Méphisto
dans La Chronique illustrée du 13 décembre 1872
Depuis samedi soir, M. Massenet s’est incontestablement placé à la tête des jeunes ; c’est leur chef de file, c’est leur véritable colonel. Nous n’avons pas la prétention de diminuer le mérite de M. Georges Bizet ou la valeur de M. Guiraud ; seulement, l’un a arboré le drapeau de Ch. Gounod, l’autre est officier à la suite du Chalet et de Giselle. M. Léo Delibes n’a pas non plus rompu en visière avec cette tradition-là. Tous, tant qu’ils sont, peuvent compter sur l’avenir ; tous sont au-dessous de la moyenne générale des talents ; je suis persuadé néanmoins que M. Massenet les dépassera, et je trouve que Don César de Bazan en est la preuve.
Le livret est un des meilleurs qu’on ait vus, il était écrasant et l’on peut dire que le musicien a été à sa hauteur. Le duo des deux basses, l’entracte sévilliana du troisième acte, la romance chantée par madame Galli-Marié auprès de Don César endormi sont des morceaux de premier ordre.
Le début de M. Massenet dans la carrière théâtrale est un des plus éclatants qu’il y ait eus dans ces dernières années. On savait que l’auteur maniait l’orchestre avec une expérience consommée ; on peut ajouter aujourd’hui qu’il est né pour la scène et qu’il y tiendra un rang distingué. Son originalité est déjà frappante ; elle ne consiste pas en telle ou telle manière d’écrire une phrase ; elle consiste plutôt dans un certain emploi des masses instrumentales et dans une couleur générale qui appartient bien en propre à M. Massenet.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Lucia Pasini (13 décembre 1872). Théâtres. Les fours noirs. Consulté le 19 juin 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/uq8r